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La nuit pétille jusqu'à très tard

J'ai fait résonner Chopin avant la douche, enlever le maillot marin et le reste, et sous les frottements de l'eau, je découvrais de plus en plus de bleus sur mon corps - des nouveaux - sur les jambes, beaucoup sur les bras, sur la poitrine. Pour certains, je savais d'où ils venaient, pour d'autres, je ne comprenais pas les coups. Il me semble que je me cogne beaucoup, que je marque vite, que les éventualités se succèdent. Que je me risque et me mets en danger. Je pense. Que ces bleus sont le reflet de ce qui me bat à l’intérieur, mais surtout des admonestations de l’extérieur. Je pense.

C'est une affaire d'existence.

Il y a d'autres choses qui court, d'autres envies qui rodent la nuit encore et le jour et au ciel. Mais je ne sais plus. J'ai besoin d'un immense coup de booste, qu'on me dise que je suis capable de l'impossible. On attendait tous nos notes cet après-midi. Alix m'a appelé à 15h37 pour savoir. Et ce soir, on a conclu les détails de ce mois et demi à s'échanger les cours, les livres, le stress et les cafés ensemble au Café des Anges où Clément avait mis un terme à notre histoire. Tiens! Parlons-en de cette histoire. Julien disait qu'elle m'avait fait encore plus de mal que ça. Bien sûr, seulement les autres en avaient marre d’entendre, et ici, je me devais de changer de disque. Alors j’ai fait comme si. Comme si ce n’était qu’une petite histoire de deux mois qui a duré beaucoup plus dans ma tête, et dans les sentiments du reste. Mais en réalité, il y a d’autres choses. Il y avait. C’est évident. Ce week-end sera de nouveau un supplice. Et je n’en peux plus de m’imposer ce genre de démangeaisons plus vives que passagères. Je vais arrêter tout ça, et me mettre à ouvrir les yeux sur le Prince charmant, sur les maisons d’édition et les journaux gauchos. Je vais me mettre à faire ce que je veux faire. Tu sais, créer, écrire, Danser, tous ces trucs qui s'impatientent en moi. En attendant, Alix concluait par ‘je t’attendrai après mon cours jeudi, je t’embrasse'. Moi aussi. Moi aussi je voudrais t'embrasser. Parce qu'il n'y a plus que toi. J'ai bouclé pas mal d'histoires ces temps-ci. Ou peut-être juste ces deux ans d'influence mais ce n'est déjà pas si mal. Et puis Hugues est amoureux maintenant et Gabriel s'est tiré avec sa seule et unique vie, alors il me reste les regards sur toi. Je voudrais avoir le temps et le charme de me reconcentrer sur toi. Oui t'embrasser. Et puis je sais que ça pourrait marcher dans ton Paris. On ferait des voyages, on jouerait aux grands reporters tous les deux. Si tu savais comme j'ai envie de profiter, de chaque instant, de chaque cours. Ne pas les sécher pour travailler mais simplement parce que le printemps se pointe et que les ballades au bord de la Seine sont bien plus importantes. Je vais finir par lâcher. Je me dois d'attendre encore quelques mois. Mais je voudrais que tu sois là quand la corde se détendra. Je voudrais que tu sois là à partir de demain, 15H04 devant l'école. Je voudrais que tu ne me lâche plus Alix. Que tu ouvres les yeux sur nous, sur ce qu'on pourrait être. Sur ces ragots qui courraient dans les rangs des amphis de la ligne sept. Je voudrais que tu me trouves comme je t'ai trouvé le deuxième jour de cours de cette année - rappelle-toi, le premier, j'étais arrivée en retard et m'étais assise au dernier rang à côté de toi. Tu es le deuxième plus gros challenge que je veux tenter. Si tu savais, comme j'ai peur de cette fille qui revient de Rome depuis le début. Intuition désagréable et indécente. C'est difficile pour moi. De me jeter à l'eau quand je tombe amoureuse. Tu sais que ce n'est pas arrivé depuis Clément. Ne parlons pas d'Hugues ce soir je t'en prie. On filmerait nos hésitations et notre pudeur maladive. Et puis tu filmerais la vie devant moi. Dans une robe blanche, dans tes Ray-Ban, et dans des villes qui ont des horizons orange et jaune, et puis vert clair aussi. Laisse-moi, attrape-moi par la main et allonge moi sur la paille. Endort mon côté malsain pour des mois dans tes bras, et fait renaître ce qu'il y avait de beau en moi. Le pastel du jeu. Et la fraîcheur d'avant qui s'est dissipée dans la tristesse depuis mes 18 ans. Approche, plus près pour couler dans mes veines. Je veux t'avoir dans la peau Alix, je veux comme j'ai eu Antoine et Clément et comme j'attends Hugues. Sacrément dans la peau, et sous les ongles, et la chair rose et blanche. Une fois lancés, je sais que ce sera facile. Et brillant. Et surtout, ça ne fera que nous appartenir. Eperdument.

 [Les Rêves Américains, Marc Lavoine]

Ecrit par lilou, le Mercredi 17 Mars 2010, 20:46 dans la rubrique Au jour le jour.

Commentaires :

aubes
aubes
17-03-10 à 21:03

C'est beau ça. Ces mots conjugués au tu.

 
passionnee-par-les-reves
passionnee-par-les-reves
19-03-10 à 20:38

Re:

Oh oui je voudrais les conjuger avec lui pour de vrai, enfin pour plus qu'actuellement. Et puis pas que les mots en plus.

 
ecilora
ecilora
17-03-10 à 21:20

Il est beau ce texte (bis).
Je t'espère des bulles de champagne, encore et toujours. Des petites bulles qui naissent des aspérités du verre.
Alors on relance la roue parce qu'il le faut et surtout ne pas attendre qu'elle s'arrête pour suivre sa route.
BzOo

 
passionnee-par-les-reves
passionnee-par-les-reves
19-03-10 à 20:39

Re:

Oui, et tu as raison, je crois que j'ai tendance à la voir s'arrêter avant de me décider à la relancer. Mais là elle s'immobilise bien comme il faut, limite elle commence à tourner dans l'autre sens, enfin depuis quelques temps déjà. Alors la relancer,mais il faut de la force pour ça tu sais...

(mais comme je ne suis plus "défaillante" sur mes relevés de notes! )


 
blue dragonfly
19-03-10 à 16:00

J'aime...

Chopin sous la douche, les ballades en bord de Seine, et l'amour dans la peau.

Tu es capable de l'impossible, je crois.


 
passionnee-par-les-reves
passionnee-par-les-reves
19-03-10 à 20:42

Re:

J'aime quand on comprend l'essentiel dissmulé sous des mots et des mots : Chopin, la douche, et l'amour oui je crois qu'il y a de ça.

merci, de me le dire alors. Pour le reste.


 
ninoutita
ninoutita
21-03-10 à 00:50

Le mieux serait peut-être qu'apparaisse un nouveau prénom.
Je prends mes désirs pour les tiens, je m'en excuse.
En tout cas, ton texte est beau, toujours aussi teinté de mélancolie.

 
passionnee-par-les-reves
passionnee-par-les-reves
24-03-10 à 21:07

Re:

Oui un nouveau prénom. Tu ne crois, peut-être, pas si bien dire. Enfin je ne sais pas (affaire à suivre je pense).
Et toi, il y a un nouveau prénom, puisque c'est ton désir...

La mélancolie, oui, toujours là je crois.