M'arracher les cheveux avec cette force et cette incompréhension qui emplissent mon estomac. Comme un goût de vomi dans la bouche. Une absence incontrôlable et le reste entre les doigts glacés. A cause de ce 19 mai. Parce qu'il y a deux ans, tout semblait beaucoup plus beau. Et même que j'ai retrouvé ce dossier de français sur les Boulevard de ceinture ce soir. C'était à rendre pour le 12 mai. 2004. C'est loin 2004 je crois. On avait passé les vacances d'avril à se chercher. A boire un peu à cette fête d'anniversaire. Je nous revois dans cette pièce noire, lumière étreinte, à parler pendant des heures. Je mettais déchaussée, et toi tu avais la tête embuée par l'alcool. En mai c'était le soleil un peu sur nos peaux et le sourire dans les lèvres sans beurre de cacao. Il avait fallu travailler jusqu’à presque la nuit pour rendre à temps ce 19/20. C'était aussi Modiano et les fiches qui commençaient doucement à s'étaler sur le bureau. C'était ma langue dans ta gorge pour la première fois et l'absence des autres. Et aujourd'hui, ce sont les dossiers d'admission, les photocopies du diplôme du Bac, les lettres de motivation sans réellement d'inspiration. C'est le temps qui passe à la fois à la vitesse de la lumière et pour d'autres choses un peu comme les pages de Yourcenar qu'on avait plus le temps d'avaler. Les souvenirs me restent dans la gorge et je n'arrive pas à les vomir. Et je ne veux pas vraiment. Vouloir reporter le même jean que ce jour-là, le même petit haut noir que j'avais acheté en Irlande. Retracer ce mercredi dans les yeux. Et même à en pleurer cette d'année. Alors pourquoi j'ai eu cette putain de boule dans le ventre toute la journée. Quand j'ai poussé la porte lourde de la rue Saint-Denis entre un sex-shop et mauvaises fréquentations. Quand on a travaillé sur nos pêchés capitaux pour cet espèce de pré-examen. Quand la luxure nous a fait faux bon.

[Et des 19 mai, je sais qu’il y en aura d’autres. Avec toi].