Samedi 06 septembre 2008.
Je doute. Je doute et je ne réalise pas bien. Que l'été, les deux mois d'été sont déjà du passé. Je doute et il y a tellement de raisons. Il m'a fallu deux ans et demi avant d'aimer Paris comme je l'aime. Deux ans et demi à trouver de véritables amis. Parce qu'au fond, ça ne change pas, je suis prudente en amitié. Et je prends mon temps. Deux ans et demi avant de trouver des personnes avec qui je parle sans m'interrompre de penser, avec qui rien n'est impossible. Il m'a fallu deux ans et demi avant d'avoir de vraies habitudes : un restau libanais, une carte étudiant de la même Fac, un coin où aller quand rien ne va, un cinéma. Je n'ai jamais aimé autant Paris que ces - six - derniers mois. Ces mois dans le creux de ses mains. Dans le creux de ses reins. Parce que je sais que, merde, il y était pour quelque chose. Et puis depuis ce 1er Janvier, il y a Anne, my Jude, avec son prénom de déesse grecque, ses allures timides, son regard caché sous sa frange, son insupportable façon de ne pas aimer les autres, son incroyable capacité à dénicher les nouveaux groupes Rock qui commencent par "The", sa si particulière gestuelle, sa fâcheuse tendance à croire qu'aucun garçon ne se retourne sur elle, son irresponsable timidité, sa station de métro - quand je passe Saint-Paul, bien sûr je pense à toi, ses boléros noirs, son collier playmobile, nos concerts, nos Beatles, notre Rhum désormais bannis, nos Naz, ses tonnes de souvenirs qui se bousculent dans nos mémoires lactescentes, ses culottes petits bateaux, nos Danses, nos Danses nos Danses, son départ imminent. Parce que ça y est. Elle se barre pour de vrai. Paris se retrouve seul, sans Clément, sans Jude, sans le beau temps. Paris est de nouveau à conquérir. Comme un château de carte, j'ai l'impression qu'une fois dressé, tout s'évapore. Ça part en fumée, et elle m'aveugle. Je vais me noyer dans le travail, me noyer et attendre peut-être qu'ils reviennent. Tout recommence - les départs le dimanche soir, la valise à moitié bouclée, les yeux bleus foncés de fatigue incertaine, les livres. See you soon.
Commentaires :
Il me semble a moi aussi que les gens partent dès qu'ils s'inscrivent dans nos habitudes. Et c'est pour ça aussi la prudence. Parce qu'on le sait, au fond. Mais on laisse tomber les dernières armes à terre, on s'accroche, enfin on respire. Et puis ils s'en vont.
Et oui. Tout est alors de nouveau à conquérir.
Fatigue. (angoisse, nostalgie, un masque à oxygène, vite).