Aujourd'hui, vingt-trois mai, Alix a vingt-quatre ans. Je suis amoureuse comme au premier jour. Au deuxième jour de notre rencontre plutôt.
Tu vois bien que je n'arrive plus à écrire ici, et au fond, ce n'est pas très grave. J'avais juste envie de dire ces vingt-quatre ans et ma toujours cruelle envie d'être (avec) lui. Je l'ai appelé à 14h34, à 12h j'me disais : "Allez retranscrit un peu cet entretien encore", et j'ai tenu jusque 14h34 comme ça. Il n'a pas répondu bien sûr. Pendant ma seule pause de la journée, à 17h55, il m'a rappelé. Une minute douze seconde, mais j'ai raccroché parce que je n'entendais rien avec les bruits de la rue.  Et j'en avais marre de lui demander de répéter. Une minute douze seconde pendant laquelle j’ai dit Bon anniversaire, lui ai demandé s'il rendait en septembre et puis lui a dit qu’il avait mal au dos. J’ai réagi en disant : « Encore ?! », comme si j’étais au courant et suivais sa vie depuis un moment. Ce qui, au fond, est quelque part le cas. Alors j'ai rappelé tout de suite après, arrivée dans le couloir - et peu importe que mon chinois devienne froid, ça résonne dans l'escalier et ma porte d'entrée grince, il fallait mieux rester dans le couloir - j'ai rappelé donc à 17h56 durant une minute et quarante et une secondes. Nous avons parlé de ses nouvelles photos, et chaque fois, j'ai l'impression que mon avis à moi est important pour ça. Lui ai demandé où ils en étaient de la publication. Ils pensent à une sorte de journal. Bien sûr il m'a dit "On se croise bientôt". Ce à quoi j'ai vivement répondu : "J'ai envie de te dire oui, puisqu'on est censé se voir depuis janvier ! ". Je n'ai pas compris sa réponse et là encore, n'est pas voulu le faire répéter. Me suis adoucie ensuite en disant "Quand tu as du temps, dis-moi". Il a dit "Je t'embrasse". Ce putain de "Je t'embrasse" à la con bordel. Auquel j'ai réussi à répondre - bravo Lucie - "Moi aussi" - oui parce qu'il faut comprendre en l'espace d'à peine deux secondes qu'il est d'usage de renvoyer un baiser quand la personne dont on est amoureuse (j’ai failli écrire la personne qu’on aime) vous dit « Je t’embrasse » à la fin d’une conversation d’une minute douze seconde plus une minute et quarante et une secondes. Juste avant cela, je lui ai bien sûr resouhaité un bon anniversaire et de bien s’amuser.

Je meurs d’Alix. Je meurs d’Alix et de beaucoup d’autres. C’est ça mon problème, c’est qu’il est numéro Un, mais qu’il est le seul. Comme Hugues peut parfois l’être. Mais que d’autres aussi, me font mourir.

Le vingt et un mai, j'ai cru avoir oublié son anniversaire. Et non. C'était une occasion officielle d'entendre de nouveau sa voix. Après ses mois d'absence. Longs mois. Oui au final, c'est de leur absence que je meurs radicalement. Alix, Jan. Et tu sais qui d'autre(s).