Lundi 23/08/10 -

Je tiens le coup. Je t'assure que j'essaie de tenir le coup le plus fort possible. Je suis rentrée tôt alors que j'étais bien ce soir au T*pe Bar avec Manon, G. et Stan. Samedi soir aussi je suis rentrée tôt. Alors qu'il y avait ce grand garçon blond et fin qui me trouvait marrante et très cultivée apparemment. Il me parlait de Marketing alternatif -et je me surprends aujourd’hui à écouter et réagir bref. Mais pas que. Il me parlait du Caire parce que l'eau planante et inviolable du canal de l'Ou*q donnait l'impression d'un paysage aux pyramides renversées. Il y avait ces musiciens algériens à qui il manquait des dents, juste à côté sur le muret sur lequel on était. Il recevait des sms de son ami, qui était à deux pas, assis sur le quai. L'impression d'avoir 15 ans et un ami qui "nous grille" alors que rien. Rien il ne se passait rien. Je ne séduisais pas, je ne me trouvais pas jolie mais une petite poupée à qui on a envie de pincer les joues. Et je me prenais à la discussion. Au jeu du ‘tu as vu, on a passé le temps maintenant, tu as vu, l’âge qu’on a’ et on parle. Les gens ont aussi peu communiqué et pourtant ils parlent constamment. Ma tête grouille de conversations diffuses et inhérentes, la preuve, je n'ai jamais trouvé le silence aussi insupportable qu'en ce moment. Je repense à Clément comme un vague souvenir et je dis je l'ai aimé quand même ce garçon. Je me sentais bien à ce moment là, sans doute parce qu'à deux c'est plus facile. Même s'il m'a rarement montré que j'en valais le coup. Il y a peut-être eu cette fois où il avait dit, des fois tu es rayonnante tu ne t'imagines pas. Ou quelque chose comme ça. Juste après avoir dit que d'autres fois, j'étais trop stressée et stressante. Enfin c'était l'idée, mais je ne l'ai compris que trop tard. Bref. Cette histoire s'est terminée et il n'en reste plus aucun amour. L'amour des souvenirs oui. Et je ne sais pas pourquoi j'en parle aujourd'hui, ici, pourquoi j'en parlais ce soir à Manon, et pourquoi j'y pensais ce week-end -me disant il doit encore être de l'autre côté du monde alors attends septembre avant de rappeler. Donc je me sentais bien et le fait d'être à deux comblait ce manque de confiance incroyable. Aujourd'hui, je ne me sens pas plus mal je crois. J'ai appris beaucoup et compris encore plus il me semble. Ce n’est pas que j'ai plus confiance. C'est que je crois savoir à peu près ce que je vaux. A quelques évaluations près. Bien sûr je travaille tout le temps, même en août ça n'arrête pas. Bien sûr que je suis rentrée tôt parce que je suis raisonnable, mais me laisser être l'inverse serait un risque que je n'ose pas prendre aujourd'hui. Ca ne servirait strictement à rien de devenir au grand jour un peu plus moi, de faire exploser cette partie de moi que j'essaie d'enfuir depuis qu'Antoine m'a coupé le souffle une après-midi de novembre bien trop froide pour qu'elle n’ait jamais existé. Jamais plus je ne veux ressentir ce déchirement dans tout le corps, et l'impression qu'il n'y a que ça, et que ce ça n'existe plus. Jamais plus je veux l'arrachement aussi douloureux -en même temps, c'est bien dans ces moments-là qu'on se sent vivre parce qu'on a l'impression de mourir non?. En fait, ce que je ne veux plus, ce sont les fins d'histoires crades et malveillantes. Comme cette fin de Terminale S avec cet Antoine indocile. Je ne sais absolument pas pourquoi ils atterrissent là aujourd'hui. Peut-être pour justifier pourquoi je prends autant de temps avec Alix. Parce que je ne veux pas faire foirer une seule seconde ce qui pourrait arriver. Et si ça arrive, et bien j'aurais eu raison de jouer la patience et le travail au corps. En douceur, très doucement. Presque sans remous, des signaux imperceptibles.

J'avance toute seule -depuis toujours-, et pourtant aujourd'hui, je ne le vis pas si mal que ça. C'est lourd parfois, mais ils et elles sont là. Je veux Alix, mais je veux aussi y arriver ailleurs : la grande école, les deux Masters, notre roman, ma pièce de théâtre, et la Danse qui me lance d'énormes appels de phare en ce moment -Dieu que c'est bon de se sentir rappeler à l'ordre-, et tout ça, il n'y a que moi qui puisse l'arracher aux branches suspendus très haut. Il n'y a que moi qui aie la force de grimper aux impossibles rêves. Et je tangue, mais ça n'est pas grave. Parce qu'en réalité ce n'est pas l'eau du canal qui faisait penser au Caire. C'est la séparation qu'elle imposait entre nous et la rue d'en face. Nous représentions la ville animée du Caire, et en face, ça aurait été les pyramides. Côté face.
Je plonge.