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Suis-je d'effroi glacé

*  Pont-Neuf, juin 2008

Vendredi 29/08/2008 21h20.

Je suis arrivée à Paris sans la respiration de juillet. Je suis arrivée sans sourire, la rue de la Roquette était grise. Paris était gris comme un matin de novembre. Je n'ai pas ressenti tous ces gens qui avançaient en foule opaque. J'ai poussé la porte de l'appart et il y avait cette odeur. Cette première odeur imminente d'il y a un an. Quand les meubles n’étaient pas encore montés. La première chose que j'ai vu c'était Clément. Il était partout dans l'appart. Des traces de Clément qui arrivaient par vague à chaque port de tête. Ça a commencé par cette cigarette cassée en deux sur la table jaune. Ces places de concert au Gibus scotchées au-dessus du bureau sur les phrases de Nietzsche. La bougie rouge à moitié consumée de quand l'ampoule n'éclairait plus. Et puis bien sûr il y a eu les draps. Ces draps dans lesquels il n'avait jamais vécu. Je me suis allongée spontanément à gauche, sans réfléchir. Je dormais à droite d'habitude, avec d'autres. Je me suis retournée en cherchant. Bien sûr il était là, partout, au bord de mes doigts, dans mon dos - j'ai pleuré sous mes mains vides. Que des draps à toucher, rien que ça, pas de corps, de son corps juste parfait. Parce qu'il était parfait son corps simplement. Non rien de simple. Pas trop dessiné, fin et accordé. J'ai pleuré et ça faisait quelques semaines que je ne l'avais pas fait pour lui. Il y avait le manque qui subsistait, toujours le manque de lui, le mal de lui et puis plus rien. Un énorme vide à la place du coeur. Dans mes sanglots je me détestais. Le lit était bien trop grand, bien trop près de lui. La pilule reste coincée dans la gorge. Et puis sur la bibliothèque, les GF qui se jouaient de moi. Ce matin, la fleur fanée sur les livres du haut.  Son absente présence me retournait le coeur. Tout m'a semblé insaisissable. Paris, lui, nous.  L'impression de ne pas être chez moi ici. Pas de trop mais étrangère.

Il y a eu ce concours. Ca puait le facho dans la Fac. Du marbre partout. Dans l'amphi il y avait deux horloges. Et du blanc, beaucoup de blanc. Cette fille qui semblait comme moi. Double bientôt triple cursus, l'Art et les l'études, l'ironie, la vie sociale optionnelle. Je crois qu'on aurait pu bien s'entendre si je n'avais pas eu du mal à me concenter à dégagez, expliquez et commentez les aspects essentiels de cet article de presse. Triple cursus oui. Pour me cacher un peu plus. Pour combler l'absence. Le soir, ils étaient là, ex-expatriés, à se souvenir de leurs vacances d’août. Spectatrice de leurs sourires de l'autre bout du monde. A la terrasse d’un bar de Châtelet. Le même qu’il y a un peu plus d’un an. Et j’ai pensé à vous. Marich m'a lâché quelques clopes pour le festival - sont vite cassées en deux dans la poche droite de ma veste kaki. Les cigarettes sont faites pour se casser en d'eux.

Ecrit par lilou, le Dimanche 7 Septembre 2008, 12:24 dans la rubrique Au jour le jour.