J'ai rêvé de la butte dans le noir, de l'autre chanteur avec ses cheveux mi-long qui semblait dur, inabordable. Et en fait non. Regarder la scène de là-haut et se dire qu'on n'est pas parmi la foule qui se bouscule. Se dire qu'il y a l'envers du décor aussi. Surtout. Se dire qu'il y a eu la chance mais surtout tous ces allers-retours à la Radio pour être privilégiée. On doit y être tôt aujourd'hui. Le festival est encore désert, j'entends des sons flous au loin. Les balances de Monsieur Aufray... Je lui ferai des yeux de petite fille émerveillée, contente de le rencontrer, il parlera beaucoup et je poserai même des questions. La suite est un tourbillon de folies douces. A peine descriptives. Je la rejoins, je lui donne son autographe. Je me sens bien, je ne veux pas partir après le dernier concert. Je ne veux pas voir démonter les tréteaux et plier les chapiteaux. C'est là que la dernière après-midi commence, alors surtout s'en mettre plein les yeux, plein les tympans. On aura revu les gestes des premiers secours et fait le tour des stands. Et puis. Je me suis avancée sur l'arrière de la scène. Restée béate. Inerte. Alors comme le public n'avait pas accès aux balances, je me suis assise dans l'herbe piétinée de la veille, et mes yeux ont jonglé entre les musiciens : l'orgue au premier plan. Ils étaient là, pour moi toute seule. Sensation étrange d'un moment d'éternel délice. Je ne les connaissais pas, et pourtant c'est comme si les paroles sortaient spontanément de ma bouche. Le chanteur avait l'air froid, distant, pro en fait. Sur la petite scène, mon petit groupe belge s'apprête et moi je suis impatiente comme une petite fille. Je mets de la mousse dans mes oreilles, on est si près des amplis. Je prends des notes sur une feuille chiffonnée pour l'interview qui suit. Je retrouve F. et je demande à poser la première question. J'ai oublié la distance après, le professionnalisme. J'ai demandé des photos et quelques signatures. Je pensais les revoir quelques semaines plus tard, et à cause du son. Stop. Peut-être qu'on se ressemble, peut-être qu'on aurait voulu chanter les sixties, peut-être qu'on aurait aimé apprendre l'anglais avec les Beatles et casser les guitares. Et puis les Hurlements et leur instrumentalisation remarquable. On a chopé quelques infos et on a encore branché nos micros. F. et moi avions Erwan juste pour nous. Il était à la fois attachant, flippant et « désorientant ». L'interview s'est bien passée, j'ai été audacieuse, prendre aux mots ça j'aime. On ne sait toujours pas pourquoi Léo. Il nous a ensuite invité à boire un verre, je ne tenais plus à l'endroit. Laurent riait en nous voyant tous les trois."Tu n'as jamais été vraiment amoureuse alors! Sinon tu comprendrais qu'on peut tout quitté, laissé tout en plan, partir, pour elle. Ou lui". Peut-être que je n'est pas aimé assez fort pour avoir cette lâcheté. Peut-être que ma Passion est plus importante qu'une personne que je pourrais aimer. Est-ce que ça veut dire que je n'ai jamais aimé pour autant? Lulu passait à côté. J'ai essayé de retrouver mon sérieux perdu dans l'alcool. Lui dire que je découvre, que j'aime, parler de Paris. Avoir un poster signé et le manager qui nous offre le prochain CD. Je suis ailleurs, où je ne sais pas. Mais tout semble plus facile. Santiano fait chanter et je manque de basculer du haut de la colline. Les paillettes sur les joues tombent du soleil. On remercie Erwan. Il m'a embrassé. Rien n'allait droit. Ni mes marches, ni ma tête. J'ai eu un baiser. Tout doit se finir, même la clope au balcon VIP, même la coupe de champagne dans la main, même les rires avec les journalistes, mêmes les yaourts au coin bénévole la veille, même la gazette du Festival, même que tout continu. Même que je serai peut-être aux côtés de Nico. l'année prochaine...

... Le lendemain, le sac est rempli, rempli de bonheur, de photo et de Musique. J'amène les sons à la Radio. Et le surlendemain, .... au micro de L... Et pour ceux qui ne comprendraient pas, et bien je leur répondrais que Je ne suis pas fou, je m'intéresse à la Liverté!